Au cœur du Sénégal, là où l’esprit d’entreprise rencontre la pure générosité , Madame Yacine Diouf une âme altruiste qui incarne l’espoir et la solidarité féminine, une femme à la vision inspirante, tisse une histoire d’espoir et de renouveau. Après avoir conquis le monde du bien-être avec brio, son cœur l’a guidée vers une mission encore plus noble : Tendre la main aux femmes en difficulté. Nous l’avons rencontrée au Centre Kayam , un refuge baigné de lumière où la résilience s’épanouit. Un cocon de douceur où chaque femme meurtrie peut retrouver la force de se reconstruire et d’oser rêver à nouveau. Laissez-nous vous emmener à la rencontre de Madame Yacine Diouf, une âme altruiste qui incarne l’espoir et la solidarité féminine.

1. Madame Diouf, vous avez bâti un empire du bien-être, d’abord avec Bodybest, le premier spa du Sénégal et de l’Afrique de l’Ouest, et maintenant avec Kayam, un refuge unique pour les femmes en détresse. Qu’est-ce qui vous a poussé à passer du monde du Bien-être à celui de la solidarité ?

Vous remarquerez que je suis toujours dans la recherche du bien-être, je dirais même du mieux-être bien que sous une forme différente. Dans le monde du spa, les femmes se confient constamment à nous et lorsque j’ai divorcé, énormément de femmes malheureuses en ménage sont venues me demander conseil. Bien entendu, elles n’etaient pas toutes victimes de violences conjugales, mais certaines l’etaient (psychologiques, physiques, financières). Le premier conseil que je leur donnais était d’avoir un travail et de mettre de l’argent de côté. Mais nous parlons là de femmes ayant un minimum de moyens. Je me suis également aperçue que le divorce était un sujet tabou dans notre société actuelle et que ces femmes n’osaient pas franchir le pas même en cas de danger imminent. Le mounial (supporter) et le soutoura (préserver la discrétion) sont imposés aux femmes par leur propres familles Puis je me suis demandé comment faisaient ces femmes sans ressources qui étaient en danger. Ces femmes que la famille ne soutient pas, à qui l’on impose encore ce « mounial » et ce « soutoura» . Ces femmes et jeunes filles dans les mariages forcés sans espoir. Et le déclic s’est fait : créer une maison d’accueil et d’hébergement pour les femmes victimes de violences conjugales et domestiques qui soit un abri et un havre de paix

2. Kayam est bien plus qu’un simple abri. C’est une véritable oasis de résilience, offrant un éventail de services, de l’hébergement, restauration à la prise en charge juridique, médicale et psychologique . Comment avez-vous imaginé ce concept unique ?

Le concept s’est fait petit à petit. L’idée générale était là et les détails arrivaient au fur et à mesure que j’avançais. L’hébergement tout seul ne suffisait pas. La plupart de ces femmes étant traumatisées, il leur fallait une prise en charge psychologique. Certaines auraient besoin de conseils juridiques soit pour porter plainte ou tout simplement pour quitter leur époux. Pour cela j’ai pensé faire un partenariat avec l’AJS (Association des Juristes Sénégalaises) qui nous vient en aide pour beaucoup de cas. L’idée était d’avoir une approche holistique pour répondre à tous leurs besoins et leur redonner la force de recommencer leur vie.

3. Kayam offre une approche holistique de la réinsertion sociale. Qu’est-ce qui vous a poussé à inclure des ateliers de formation professionnelle dans votre programme ?

Il fallait penser au futur….. L’hébergement est capital mais est une solution à court-moyen terme. Autonomiser ces femmes est un must si elles souhaitent survivre dans la société. Ces ateliers leur permettent d’apprendre un nouveau métier qu’elles pourront pratiquer une fois sorties de KAYAM.

4.Votre expertise en finance et en gestion du risque vous a-t-elle été utile dans la création de Kayam ?

Oui tout à fait ; cela m’a permis de faire une étude SWOT (Analyses des risques, faiblesses forces et opportunités). Grâce à cette étude, j’ai pu décider si il y avait un potentiel pour cette maison d’accueil. Bien que le poids de notre société constitue une faiblesse, les opportunités surpassent de loin ce handicap.

5. Quelles stratégies avez-vous mises en place pour mobiliser les partenaires et les donateurs en faveur de Kayam ?

La première étape était d’avoir un projet et un budget bien ficelés, et que l’association soit créée dans les règles de l’art au ministère de l’intérieur. Puis (rires) j’ai pris mon bâton de pèlerin et fait du porte à porte auprès de donateurs privés, d’ambassades, de sociétés, de banques. Ces premiers dons nous ont permis de réfectionner le centre d’accueil. Je suis ensuite passée à l’étape supérieure en participant aux appels à candidatures d’ONG et de fondations qui ont répondu favorablement à nos demandes.

6. Le Sénégal est un pays où les traditions et les normes sociales peuvent parfois être un obstacle à la lutte contre la violence faite aux femmes. Comment Kayam s’adapte-t-il ?

C’est plutôt le Sénégal qui s’adapte à KAYAM. Voir une structure telle que celle-ci pousse les gens à réfléchir. Nous avons toutefois associé dans une démarche participative certain réseaux tels que les badiengokh, les chefs de quartier et responsables religieux au cours de la mise en place du projet. La communication digitale nous a aidé à atteindre notre cible et nous recevons beaucoup de sollicitations de personnes qui nous ont vu sur l’internet, les réseaux sociaux et différents organes de presse et ont le courage de vouloir sortir de leur situation .

7. Quelle est la plus grande récompense que vous avez reçue depuis la création de Kayam ?

Un moment particulier qui vous a marqué profondément ? Nous avons eu plusieurs success stories et une en particulier m’a touchée car ce fut une épreuve très difficile pour cette femme. Son mari l’avait battue à tel point qu’elle avait perdu son œil. Nous l’avons accompagnée et soutenue lors de son procès qui est toujours en cours et elle est revenue témoigner lors d’un panel. Ce fut très émouvant pour tout le centre. Elle est maintenant remariée. Deux autres pensionnaires sont maintenant des mentors pour les femmes du centre. Ayant subi des violences psychologiques, elles ont suivi des formations sur la sensibilisation contre les VBG et travaillent maintenant au centre et conseillent les autres pensionnaires.

8. Comment envisagez-vous l’évolution du mouvement de défense des droits des femmes au Sénégal et quel rôle Kayam peut-il jouer dans cette évolution ?

Ces mouvements de défense sont en train de s’agrandir et de gagner du terrain grâce à la sensibilisation par les différentes activités dans le cadre de l’autonomie, de l’accès à l’emploi, de l’ éducation, de l’accès a la sante et l’accès aux grandes prises de décisions, sans oublier les différents plaidoyers au niveau national et international. Kayam participe déjà à cette évolution par ses actions de sensibilisation, de prise de conscience, et la sauvegarde de l’intégrité physique et morale des femmes.

9. Kayam est un phare d’espoir pour les femmes victimes de violence. Quels sont vos projets pour l’avenir de Kayam ? Avez-vous des ambitions pour étendre votre action au-delà du Sénégal ?

Le souhait de KAYAM dans l’avenir est de s’étendre d’abord sur le plan national en ciblant les zones les plus touchées par ces violences. Certaines régions se situant en zone frontalières, cela permettra à KAYAM d’étendre son action au-delà du Sénégal. Nous recevons déjà des victimes de la sous-région référées par le HCR, GVF, et CARITAS.

10. Madame Diouf, votre engagement est un véritable exemple pour toutes les femmes. Quelle serait votre message aux femmes qui traversent des moments difficiles, qui hésitent à demander de l’aide ou à briser le silence sur la violence qu’elles subissent ?

Ne pas avoir peur. Des structures telles que nous, l’AJS sont la pour apporter un soutien concret. Non seulement nous hébergeons, mais nous prodiguons également l’écoute et le conseil.

11. Si vous pouviez donner un conseil à une jeune femme qui aspire à créer un impact positif dans sa communauté, quel serait-il ?

S’inspirer de ses propres expériences, avoir confiance en soi afin d’être un moyen de transmission des valeurs d’engagement et de courage utiles à l’épanouissement de tout être humain Merci Madame Diouf pour votre temps et votre courage. Kayam est une véritable source d’inspiration pour tous ceux qui luttent pour une société plus juste et plus égalitaire.

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