Interview Exclusive de Mme Colle Sow Ardo

Elle n’est plus à présenter sur la scène de la mode africaine et internationale. Madame COLLE SOW ARDO ,  princesse Peule du Baol, voit le jour dans le département de Diourbel en 1951.

Elle a accompagné son époux à Paris où ils ont vécu de 1974 à 1982. Durant son équipée parisienne, les grandes marques françaises font appel à sa longue silhouette de mannequin sahélienne pendant qu’elle alterne les défilés avec les cours de l’Institut de coupe et de mode de Paris, dont elle sort diplômée.

Nous avons le plaisir et l’honneur de la recevoir pour vous dans ce troisième numéro de votre magazine digital de référence.

Derrière un sourire affable et détendu, le parcours d’une combattante stoïque au milieu des épreuves dont la plus terrible pour une mère. Depuis cet événement tragique, c’est la première fois qu’elle consent à accorder une interview. Après les salutations de rigueur, nous entrons directement dans le vif du sujet.

 Interview  EMMANUELLE JODAN ADJOVI  Photographe STEPHANE TOURNÉ

FIERS D’ELLES . Quand avez-vous décidé de rentrer au Sénégal et pourquoi ?

 COLLE SOW ARDO. En 1983, mon époux rentrait au Sénégal, aussi simplement (rires)

FIERS D’ELLES . Du mannequinat à la mode, un chemin tout tracé ?

C.S.A.  J’ai eu à défiler pour beaucoup de grandes  marques dont  Feu ‘ Chris Seydou ‘ qui m’a beaucoup inspiré et coaché quand j’ai eu fini de m’installer . C’est une des raisons pour lesquelles j’ai pris des cours de mode à Paris.

Une fois rentrée au Sénégal c’est donc naturellement que j’ai lancé ma marque en 1983.

Cela n’a pas été du tout facile, mais la passion aidant et la foi, nous avons tenu.

Cela n’a pas été du tout facile, mais la passion aidant et la foi, nous avons tenu.
Cela n’a pas été du tout facile, mais la passion aidant et la foi, nous avons tenu.

FIERS D’ELLES . C’est quoi SIRA VISON ?

C.S.A. C’est un évènement que mes équipes et moi-même avons créé pour célébrer les 20 ans de la marque COLLE SOW ARDO, afin de célébrer cet anniversaire avec tous les créateurs nationaux comme internationaux que j’ai connu à travers ce cheminement.

Montrer aussi que nous , CREATEURS AFRICAINS , pouvons être unis pour porter haut le flambeau de la mode !

FIERS D’ELLES . Le nom de l’évènement a-t-il rapport avec votre fille ? (Sourire)

C.S.A. .(éclats de rires) Non pas du tout, la plupart des gens pensent cela, mais en fait, le  SIRA dans le nom de l’évènement veut dire : SALON de l’INNOVATION et de la REPRESENTATION AFRICAINE. D’où SIRA VISION

FIERS D’ELLES . Pouvez-vous expliquer à nos lectrices qui ne connaissaient pas, comment se déroule SIRA VISIONj

C.S.A. Sur trois jours clôturés par un grand diner de gala allant jusqu’à 1500 personnes (rires) . Il y a des expositions ventes, un grand concours de jeunes créateurs, des panels, etc….

FIERS D’ELLES . Vous avez fait combien d’éditions ?  Et pourquoi avoir arrêté ?

C.S.A. Douze !  Nous avons du lever le pied malgré nous, car la motivation est toujours là. Mais assez difficile de trouver des sponsors, car les différentes structures croient peu en la mode comme investissement. L’organisation annuel d’un évènement pareil et très prenant, et le temps passe vite. Chaque six mois il fallait remettre le pied à l’étrier et finalement je n’avais plus réellement le temps de m’occuper de ma marque.

FIERS D’ELLES . Mais au bout de douze ans, vos équipes n’auraient-ils pas pu gérer ? la machine devrait être huilée

C.S.A. (sourire) En effet, j’ai voulu que mon équipe , avec sa fougue et sa jeunesse , prenne les rennes et que je les accompagne , mais elle n’a pas voulu. Il fallait que je sois toujours aux commandes. Mais comme vous le dites si bien TOUT EST GRACE et on a du lever le pied. Mais la demande existe et le consommateur sénégalais, voire africain a besoin de show et de choix de mode.

FIERS D’ELLES . Pouvons nous espérer un retour de cet évènement d’envergure ?

C.S.A. (éclats de rires) l’avenir nous le dira

FIERS D’ELLES . Réussir en tant que femme chef d’entreprise a-t-il été difficile 

C.S.A. Rien de bien ne se fait sans difficulté. Mais dans notre cas d’espèce, c’est le manque de valorisation de notre métier, le commun des gens pensent qu’évolue dans la mode ceux ou celles qui ne réussissent pas. Pourtant c’est une entreprise dans tous les sens du terme avec ses difficultés.

Ce métier est particulièrement difficile car alliant la créativité et la gestion. De plus la plupart de notre personnel est masculin , donc …. En tant que femme pas évident! (rires) . Parfois des bribes de jalousie car de la mode, les autres ne voient que les strass. Mais j’aime énormément mon métier

FIERS D’ELLES .  Donc si c’était à refaire, changeriez-vous de métier ?

C.S.A (rires) Je le referai avec plaisir, mais j’aurais bien aimé aussi être photographe !

Même si c’est avec beaucoup de gratitude, que nous faisons face depuis plus de 30 ans,

aux rythmes naturels des choses, des effectifs, des charges….

De nos jours les jeunes sont trop pressés ; Dès leur sortie d’école ou de formation ils veulent déjà tout avoir

FIERS D’ELLES . Quels conseil donneriez-vous à nos lectrices qui voudraient bien vous emboiter le pas 

C.S.A. FAIRE PREUVE DE PATIENCE. De nos jours les jeunes sont trop pressés ; Dès leur sortie d’école ou de formation ils veulent déjà tout avoir (soupir)

A ceux qui sortent d’école de mode, je tiens à dire que la formation n’a rien à voir avec la production ! il faut de l’expérience, faire des stages, assoir les compétences.

FIERS D’ELLES . Comment voyez vous l’avenir de la mode africaine ?

 C.S.A. Dans le prêt à porter ! les vents de la mode sont dans le sens des créateurs africains, donc fonçons et positionnons-nous dans ce secteur !

FIERS D’ELLES . Secret de votre réussite ?

C.S A.  Je ne sais pas si j’ai réussi, mais je sais que pour une femme, pour monter les marches de ses rêves, il faut avoir un compagnon, un mari, une famille solide. Par cela je veux dire un cercle rapproché qui croit en vous, en votre potentiel et vous pousse !

FIERS D’ELLES . Faites vous dans le caritatif ?

 C.S.A Absolument ! Je l’ai fait dès le début de ma carrière et ne me suis jamais arrêtée depuis 30 ans .J’aime aider et partager, que se soit avec les écoles coraniques, les familles défavorisés.

Avec SIRA VISION nous avons fait beaucoup dans ce sens, et aujourd’hui mon plus gros projet est la construction d’une mosquée dans ma ville natale de Diourbel.

Depuis 4 ans nous sommes dessus, les gros œuvres sont finies, mais le reste prend encore plus d’argent et de temps. (Rires)

Je rêvais finir la mosquée avant l’ouverture du complexe où nous sommes, mais le ciel en a décidé autrement. J’y ai mis beaucoup d’argent malgré les aides et soutien diverses. Ma famille et moi-même nous sommes rendus compte qu’il valait mieux finir et ouvrir ce complexe afin que l’argent que l’on pourra gagner en travaillant ici serve à la finition de la mosquée.

De plus dans cette mosquée, nous avons prévu, un école de formation professionnelle (couture, fer forgé, menuiserie, …) Un DAARA, école coranique, afin d’aider les jeunes à l’insertion dans la vie active.

 FIERS D’ELLES . Je suppose que l’on n’en arrive pas là où vous êtes sans avoir des adversaires, voir des ennemis, comment gérez-vous cela ?

C.S.A. (sourire mélancolique) Vous savez, a un moment de ma vie j’ai cru en avoir, mais après le décès de mon fils (assez brutal) et toute l’affection que mon entourage m’a donné,  surtout celle de ceux dont  je pensais ne pas m’aimer, j’ai compris que j’avais énormément de chance dans ma douleur. J’ai eu à dire à mon époux  ‘ Si cette douleur était un gâteau, nous n’aurions pas eu notre part ‘

Je mets à profit cet interview pour remercier tout le monde du fond de mon cœur, en mon nom et en celui de ma famille.  La vie ne vous renvoie que ce que vous lui donnez, personnellement j’ai choisi l’amour.

La haine, les ennemis ne sont qu’une vue de l’esprit. Savoir ce que l’on veut et avancer avec patience est  peut-être ce qu’il y a de mieux. Je vous disais en début d’interview que vous êtes le premier que je donne depuis cette épreuve, et je le fais avec grand plaisir car j’aime beaucoup aussi ce que vous faites et comment vous le faites. C’est moi qui suis FIERE DE VOUS !

FIERS D’ELLES . Merci beaucoup C.S.A. MERCI à vous et n’oubliez pas que TOUT EST GRACE (rires)

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